Samedi 15 Février 2020
56 ème Café Mémoire
Le monde fascinant des plantes
Par David Roux
Toute l’équipe vous souhaite à tous et à chacun une bonne année 2020 et espère qu’elle nous rassemblera nombreux à chaque rendez-vous. Nouvelle année, nouveau cycle de découvertes, à travers les Cafés Mémoire…
Malgré un changement de date, involontaire de notre part, (samedi au lieu du traditionnel vendredi) la salle du Vieil Hôpital résonna comme à l’accoutumée d’une ambiance chaleureuse et conviviale.
Aux soixante-dix personnes ayant réservé un plateau repas s’ajoutèrent une trentaine d’auditeurs venus écouter David ROUX, maître de conférences en physiologie végétale à l’université d’Avignon.
L’entrée, joliment investie par les premiers mimosas, et les dernières vérifications techniques confirmèrent que tout était prêt pour accueillir les premiers invités, qui dès 19h30 se pressèrent, heureux pour certains habitués de retrouver leurs places et voisins habituels, et de papoter des dernières nouvelles en sirotant le kir de bienvenue !
Ils purent également à leur guise, découvrir pour certains, les dernières éditions de Velleron Culture & Patrimoine : (Je me souviens…les routes du Vaucluse de René Michel et La Pampa ou l’histoire de la biscuiterie à l’Isle sur la Sorgue de Marie-Claude Baulin), que l’auteure, membre de notre association, se fit un plaisir de dédicacer.
Le repas fut partagé dans l’ambiance des grands soirs.
Puis, les derniers cafés servis, le changement de place, face à l’écran, indiqua que l’assemblée était prête et impatiente d’entendre David Roux leur communiquer les secrets de tous ces végétaux qui font route commune avec nous, sans que nous les connaissions, ni même parfois les remarquions.
Notre conférencier, nous a entraînés dans l’univers secret des végétaux, un monde, complexe, surprenant d’ingéniosité, pour tout dire un MONDE MAGIQUE !
Victimes de leur spécificité : l’immobilité, les plantes ont longtemps été simplement considérées comme faisant partie du décor.
Dans le mythe de l’arche de Noé, on embarque des « représentants mâle et femelle de toutes les espèces humaine et animale, c’est-à-dire la semence de tout ce qui vit », afin de perpétuer les espèces… mais il n’est pas question du monde végétal !
En réalité, les plantes, fixées sur leur support, bougent – dansent même parfois – mais leur mouvement est trop lent pour être perçu. Pourtant le biologiste anglais Darwin avait déjà appréhendé le sujet dans « Le pouvoir du mouvement des plantes » en 1880.
Il a fallu attendre les avancées scientifiques récentes et les expériences pour comprendre le mécanisme du mouvement des végétaux, et bien plus que cela encore : c’est un langage silencieux qui a été mis en évidence tout un système d’échanges très élaboré dont la finalité est la préservation de l’espèce.
Notre conférencier nous a donné de multiples exemples.
La plante n’a pas de nerf ? Des électrodes placées ont mis en évidence l’émission de signaux électriques. C’est toute la plante qui est un nerf complexe, permettant de diffuser des signaux dans toutes ses parties. C’est ainsi que si une chenille grignote une feuille, la propagation de l’information est immédiate dans tout le végétal qui devient toxique !
Et l’on apprend aussi que les plantes communiquent entre elles.
Notre conférencier nous a cité un célèbre cas qui a défrayé la chronique durant les années 80 : dans la savane d’Afrique du Sud, l’acacia est capable d’envoyer à ses semblables un message d’alerte sous forme d’un signal chimique volatil, lorsque ses feuilles sont broutées par le koudou (sorte d’antilope). Pour parer aux attaques des herbivores, les feuilles de tous les acacias se chargent considérablement de tanin qui empêche la digestion des feuilles et les animaux meurent.
Certains végétaux, pour se débarrasser d’insectes qui les agressent, mettent à contribution d’autres insectes pour détruire les importuns.
Ainsi, dès que la feuille de tabac est croquée et submergée par des chenilles, elle fait pousser des sucettes » poils chargés de sucs » dont les chenilles sont friandes.
Formidable subterfuge : dès la friandise avalée, les chenilles émettent une odeur qui attire des punaises ; aussitôt celles-ci arrivent et anéantissent les gourmandes !
La reconnaissance des siens : Certaines plantes sont capables d’adapter leur croissance en fonction des plantes qui poussent à côté d’elles. Si les racines sont en contact avec celles de la même espèce, elles les reconnaissent et partagent l’espace. Elles savent même reconnaître le degré de cousinage. Mais attention : si une « étrangère » se trouve à Proximité, ses racines peuvent être étouffées… à moins qu’elles soient contournées dans une attitude de grande mansuétude. (Ouf !!!).
La solidarité de la lignée. Dans certaines espèces, les vieux arbres, » les parents », reconnaissent leurs « descendants », de jeunes plants qui poussent à leur pied et auxquels ils fournissent nourriture par des millions de filaments de champignons accrochés aux racines.
Les anciens prennent soin de leurs petits ! Les auditeurs étaient éblouis à la découverte de telles capacités ! Les formes d’échanges, la communication à travers d’autres organismes, les stratégies de défense, tout cela paraît FABULEUX, au point de se demander si le végétal n’est pas plus complexe… que l’homme !
En effet, les végétaux ont d’une formidable capacité de résistance. La feuille de l’arbre est dotée de capteurs qui la rendent 20 fois plus sensible que le doigt humain. La voilà ainsi armée pour réagir à l’environnement.
Et c’est sans compter sur la découverte de l’ADN ! Des études ont démontré la complexité des génomes des plantes. Ainsi, pour le riz, ce sont 37500 gènes qui ont été identifiées alors que l’on n’en a répertorié que 22300 chez l’humain !
De quoi donner une leçon d’humilité aux hommes et les conduire à plus de sagesse.
Évidemment, le public n’a pas manqué d’interroger ce jeune chercheur sur l’utilisation de ces connaissances nouvelles dans l’agriculture pour un traitement des plantes plus naturel, se substituant aux pesticides. C’est ainsi que des idées étonnantes voient le jour.
Par exemple, pourquoi ne pas enregistrer le bruit de la chenille qui mâchouille, puisque certaines plantes réagissent instantanément par un changement dans leur métabolisme ? Les chercheurs n’ont pas fini d’en apprendre sur les plantes !
Actuellement notre conférencier travaille avec l’INRAE pour comprendre pourquoi certains pêchers sont naturellement résistants au puceron vert, principal vecteur de la maladie de Charca, dans un contexte de développement d’agriculture durable, au cœur des enjeux de nos sociétés. Cette formidable conférence, saluée par des applaudissements nourris contribuera, à n’en pas douter, à changer notre regard et notre comportement vis à vis de ces organismes vivants.
D’ailleurs trois ouvrages ont été suggérés pour poursuivre l’exploration de ce monde fascinant. Pour ne pas faillir à « notre tradition », qu’il trouva originale, David ROUX s’y plia fort aimablement en dédicaçant l’affiche de ce premier Café Mémoire 2020. Mais avant de nous retrouver pour le suivant au mois d’Avril, une rencontre, en partenariat avec Les Chevaliers de l’Onde, dans le cadre des Contes et Légendes de Provence, nous rassemblera à la fin du mois de Mars.
A très bientôt le plaisir d’une prochaine rencontre (mK-dD-mcB)